Benin - Béhanzin : Une épopée de la liberté

Tuesday 04 October 2016

Son mot d’ordre était clair : « Le Roi du Dahomey ne donne son pays à personne ». Il nourrissait pour son royaume un attachement sans partage. Symbole de la résistance à la pénétration française en Afrique de l’ouest et plus particulièrement au Bénin, Béhanzin aura construit de son vivant un mythe que revisite la postérité : celui d’un homme intrépide et authentique, un roi prêt, pour sauver son royaume, à se battre jusqu’à son dernier souffle et celui d’un héros atypique.


Un successeur inattendu

Béhanzin, de son vrai nom Ahokponou Nyakaja Honsinnyeli naît en 1845, d’une mère prêtresse vodun, Akosu Majanu dite Nan Zèvoton et du roi, Glélé, le dixième souverain du royaume de Dahomey. Son nom Béhanzin est tiré de la phrase ‘’Gbè hin azin bo aï djrè’’ signifiant : « L’univers tient un œuf dont la terre mesure la valeur ».

D’après les traditions orales, il aurait été très tôt formé à l’école de son grand-oncle, Andandozan (frère de Ghézo, prédécesseur et père de Glèlè) qui lui inculqua sa rigueur et son intégrité. Le jeune homme apprend également le commerce, l’art de de la teinture et s’initie au catholicisme. Jusque-là, Béhanzin qui jouit comme tous les enfants du roi, du statut de prince n’était pas prétendant au trône de son père. Il était le neuvième enfant de la famille royale. Le trône était prédestiné à Ahanhanzo, prince héritier et demi-frère de Béhanzin. Mais en 1875, ce prince décède dans des circonstances mystérieuses.

Béhanzin sera alors choisi comme prince héritier par son père et prendra, par la suite, le nom de prince Kondo. La légende raconte que celui-ci, pour montrer à son père qu’il était assez âgé pour gouverner, se serait fait raser la tête et lui aurait ensuite expédié ses cheveux grisonnants. Le roi Glèlè, d’après la légende, lui fit porter une houe pour lui faire comprendre la place centrale du commerce et de l’agriculture dans le royaume. « Si jamais tu te livrais à la guerre, tu ruinerais le royaume…« , aurait-il prévenu. Le prince choisit comme emblème, le requin, symbole de la puissance du royaume aussi bien à l’intérieur, qu’à l’extérieur des frontières.

Un règne tumultueux

Lorsqu’il est intronisé, le 6 janvier 1890, après la mort de son père en 1889, Béhanzin doit déjà faire face aux velléités coloniales expansionnistes de la France au Dahomey. Plusieurs dossiers brûlants sont en cours. Parmi ceux-ci, les négociations entamées par son père avec les Français sur la cession de Kutonu (Cotonou) sur fonds de tensions entre son royaume et celui de Porto-Novo.

Son rival Toffa, arrivé en 1870 sur le trône du royaume de Porto-Novo, accepta le protectorat français afin d’éviter une attaque du Dahomey. Pour sa part, le royaume de Béhanzin, plus hostile, résiste aux sirènes françaises. Cette hostilité va connaître son point d’orgue, lorsqu’en mars 1889  un régiment d’amazones du Dahomey attaqua Danko, un village de la basse vallée de l’Ouémé alors sous protectorat français où règnait le roi Kpédo de Kinto. La conséquence immédiate fut une guerre brève mettant aux prises les trois belligérants : d’une part, la France et Kinto et, d’autre part, le Dahomey. Béhanzin lance dans ce contexte une attaque sur Cotonou qui est repoussée ainsi que la bataille qu’il livre à Atchoupka. Après cet épisode, Béhanzin fut forcé de reconnaître l’autorité française sur Porto-Novo et Kinto et dut céder le port de Cotonou, à la France, contre un paiement annuel de 20 000 francs lors du traité de Ouidah conclu le 30 octobre 1890.

L’accalmie fut de courte durée car, ni Béhanzin qui était hostile à la colonisation française, ni les Français eux-mêmes qui considéraient le Dahomey comme le dernier bastion qu’il fallait conquérir pour parvenir à leur objectif d’expansion, ne pouvait supporter le statu quo.

La guerre éclata en février 1891. D’abord limitée à des démonstrations de force caractérisées par des prises d’otages de part et d’autre, les armées passent rapidement aux vraies confrontations. Désormais, ce sont des combats farouches qui opposent les troupes de Béhanzin à celles du Colonel Dodds, successivement à Dogba, Kpokissa et à Kana.

Face à la puissance de feu de la France, les troupes dahoméennes composées d’amazones, de mercenaires allemands et belges, équipés d’un armement hétéroclite allant du fusil au couteau-machette, montreront une vive résistance. Elles seront rassemblées par Béhanzin, le 4 novembre 1892, pour l’affrontement final mais seront repoussées par celles du colonel Dodds, déterminées à prendre le palais d’Abomey. Lorsqu’elles y parviennent, le 17 novembre 1893, les troupes françaises n’y verront que fumée et cendres. Béhanzin, lui-même, a incendié le palais, la veille. Le 3 décembre, le général Dodds place ‘’Agbomè’’ sous protectorat français mais il ne mettra pas la main sur Béhanzin, introuvable jusque-là.

De la traque à l’exil

Déterminées à capturer Béhanzin, les troupes françaises appellent du renfort. Celui-ci est constitué de bataillons ou de légionnaires venant  aussi bien d’Afrique noire que du Maghreb. Toujours sous le commandement de Dodds, désormais élevé au grade de général, une expédition forte d’environ 3000 hommes est lancée à la chasse au roi, le 30 août 1893. Celle-ci ayant occupé la ville de Zagnanado, marchera ensuite sur Paouignan puis sur Atchérigui. Le but : bloquer toutes les issues au roi. La traque du roi durera 3 mois. Cerné, Béhanzin se livre, le 15 janvier 1894. Il sera conduit, le 11 février 1894, à Cotonou, avec sa cour composée de quelques membres de sa famille dont ses trois filles, son jeune fils Wanilo et quelques alliés restés fidèles.

Un long voyage en terre inconnue

Béhanzin est déporté par les autorités coloniales, le 30 mars 1894, sur l’île de la Martinique avec sa famille et un interprète où ils résideront au Fort Tartenson. Durant plusieurs années, Béhanzin n’a cessé d’insister pour un retour vers sa terre natale. Il ne sera entendu que 12 ans plus tard, en 1906. Du moins c’était ce qu’il croyait car, si les autorités françaises lui accordent le droit de quitter la Martinique, la destination du roi Béhanzin n’est pas celle qu’il chérit. Il est conduit, avec sa famille, en France. Une fois sur les lieux, ils sont accueillis par les acclamations de journalistes curieux et repartiront pour Bordeaux avant de prendre le large   pour les côtes du Maghreb. Jugé indésirable à Abomey, Béhanzin sera dirigé vers Alger où il meurt d’une pneumonie à Blida, le 10 décembre 1906. Il sera inhumé au cimetière Saint- Eugène d’Alger.


Même s’il n’a pas été entendu de son vivant, sa dépouille retrouvera quand même sa terre natale. Il est inhumé le 9 mars 1928 à Djimè. Béhanzin laissera ainsi à la postérité, une légende qui fascine encore aujourd’hui.


Source: Autres Presses

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Soumaré Issouf

Professeur titulaire et Directeur du Laboratoire d’ingénierie financière de l’Université Laval (LABIFUL) au Canada

Prof. Issouf SOUMARÉ est Professeur titulaire et Directeur du Laboratoire d’ingénierie financière de l’Université Laval (LABIFUL) au Canada. Il est également le Président-Fondateur de l’INSTITUT SOUMARÉ DE LA FINANCE et de l’UNIVERSITÉ SOUMARÃâ... Lire la suite Voir plus


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